Diagnostic, 23 rue des Serruriers (2020)


Réalisé dans le centre historique de Laval, dans la cadre de la restauration d’une maison d’habitation en pan de bois sise au 23, rue des Serruriers, le diagnostic a permis d’identifier les principales phases de construction de l’immeuble. Pour ce faire, deux sondages sédimentaires ont été implantés dans le sol de la cave, accompagnés de trois sondages dans les maçonneries du rez-de-chaussée et du 1er étage et d’une analyse de la plupart des ouvrages en charpente. Au préalable, une expertise dendrochronologique, financée par la Ville de Laval, a permis d’établir une chronologie absolue pour certaines séquences de travaux.

La première correspond à l’édification de l’enceinte urbaine, probablement dans le courant du 13e siècle. La maison concernée par le diagnostic vient en effet en appui contre une section de courtine conservée sur presque toute sa hauteur. La fenêtre d’étude n° 2, placé à l’angle sud-ouest du rez-de-chaussée, a permis de dégager une partie du parement interne de ce mur et un probable ressaut de fondation.

La deuxième phase comprend la construction du mur latéral occidental qui relève en fait de la maison voisine et qui est antérieur à la façade du n° 23. S’y ajoutent, de manière très hypothétique, une partie de la charpente de toit susceptible d’avoir été mise en œuvre antérieurement à la phase suivante (1398-1413d ? 1457-1477d ?), voire la section du plancher de comble qu’elle contient, manifestement réalisée à l’aide d’une structure démontée (1398-1413d).

La troisième phase, datée du début du 16e siècle (probablement 1503-1504d), a donné à l’immeuble son aspect actuel. Elle consiste en une reconstruction, complète ou incluant quelques structures charpentées préexistantes, de l’édifice. Elle comprend principalement la mise en œuvre de la façade sur rue, de la lucarne-pignon la surmontant, d’un plancher au 1er étage (aujourd’hui remplacé par un plancher métallique) et d’un second au 2e étage (qui formait alors un premier niveau de comble), ainsi que le mur latéral côté est.

La quatrième phase regroupe un ensemble de maçonneries mal datées, principalement situées au rez-de-chaussée, et qui consistent en des comblements de négatifs et des rejointoiements divers. Une datation des 17e et 18e siècles est envisagée sans plus de précision.

C’est durant une cinquième phase, datée de 1721-1745d, que l’extrémité sud de l’immeuble paraît être reprise sur toute sa hauteur, avec une surélévation du niveau de comble et le remplacement de l’organe de distribution verticale par un escalier à balustre.

Enfin, la dernière phase regroupe l’ensemble des reprises apportées à ces structures durant l’Époque contemporaine. Ces modifications comprennent principalement la destruction complète du premier niveau de la façade sur rue, le remplacement du plancher du premier étage par un plancher métallique et l’élargissement de la lucarne, transformant par la même occasion la façade précitée, qui formait jusqu’alors un mur-gouttereau, en mur-pignon.

Au-delà, cette étude a contribué à préciser la distribution de l’immeuble et son évolution, c’est-à-dire aussi bien les fonctions qui ont pu lui être affectées que l’organisation des circulations en son sein. À cet égard, cet édifice semble avoir toujours répondu, depuis le 16e siècle tout au moins, à un programme relativement classique, partagé par la très grande majorité du bâti civil lavallois de cette période. Si son rez-de-chaussée, très ouvert sur l’extérieur, paraît dévolu à une activité professionnelle, les niveaux supérieurs ont vocation à servir de résidence tandis que l’élévation sur rue présente un caractère résolument ostentatoire. Cette dernière fonction s’avère d’ailleurs centrale au sein des travaux réalisés au début du 16e siècle avec l’édification, entre autres, d’une lucarne-pignon monumentale. Le 23, rue des Serruriers se distingue en revanche des autres immeubles de cette période par le fait qu’il ne semble pas avoir été doté de deux accès, permettant d’organiser une occupation différentielle de ses niveaux. Cela implique que l’artisan ou le commerçant du rez-de-chaussée était également la personne habitant les étages et très probablement le propriétaire des lieux.